Au départ il y a les rushes de cette séquence – bruts. Quelques trente minutes d’entretien, audacieusement mis en scène dans un atelier de poterie. Au visionnage, une première déception, l’entretien ne décolle pas.
Nous comprenons assez rapidement pourquoi. Il était ambitieux de mener un entretien croisé avec trois personnes en même temps. Le ton d’une conversation informelle l’emporte trop souvent sur le contenu. Et pourtant on sent que ça pourrait marcher. Qu’il y a peut être quelque chose à sauver.
On décide de tenter le coup.
Première étape : isoler le discours qui nous intéresse et monter au son sans trop se soucier des coupes images. Il faut déjà reconstruire un récit. Hiérarchiser les idées. Il faut ensuite gommer les tics de langage et couper les digressions qui nous font décrocher.
Cette première partie terminée, nous nous retrouvons face à une matière difforme. La continuité sonore est bien, le discours re-fabriqué fonctionne, mais les coupes image sont inacceptables en l’état et assez nombreuses.
Les plans dit de coupe sont rares. On a bien la fenêtre de l’atelier, quelques poteries, mais vraiment pas grand chose. Et puis ce n’est pas très enthousiasmant de monter des plans de coupe aussi vide de sens.
Nous vient alors l’idée de re-créer deux histoires parallèles : une femme qui fait de la poterie pendant l’entretien-conversation des trois autres et une histoire de chevaux sous la pluie à la tombée de la nuit par la fenêtre. Les rushes existent. Ils ont plusieurs mois de tournage d’écart, mais qu’importe. Nous crérons une nouvelle temporalité. Même si nous doutons, de nombreuses fois, nous persévérons.
L’expérience devient grisante. Petit à petit les histoires se nourrissent les unes et les autres. Toutes s’imbriquent, permettant des jeux de complicité et des temps de pauses aussi nécessaires qu’intéressants.
Il semblerait que ce jeu de construction, qui tient à très peu de chose, fonctionne. Mais comme pour la bonne pâte à crêpe, nous decidons de laisser reposer. Plus aucun recul pour savoir. La re-découverte la semaine prochaine nous dira ce qu’il en est. Avons-nous sauvé quelque chose ? Etait-ce un leurre ? Peut-être une étape transitoire avant autre chose ? ou bien le début du renoncement à cet entretien…
J’y crois assez tout de même.
Carnet de montage #1 – documentaire / post précédant Fin de semaine